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GHAZI Noura

Droits des détenus politiques

Description

Noura Ghazi est une avocate et militante syrienne des droits de l’Homme depuis 2000, qui défend les prisonniers politiques depuis 2004. Elle a fondé l’organisation NoPhotoZone en 2018 pour transmettre la mémoire de son mari Bassel Khartabil Safadi, un éminent militant syro-palestinien qui a été détenu par le régime syrien en 2012 et exécuté en 2015. NoPhotoZone est une ONG française qui fournit un soutien juridique et psychosocial et un plaidoyer pour les détenus, les disparus et leurs familles en Syrie, au Liban et en Turquie. Elle plaide au niveau international pour les droits des détenus et des disparus en Syrie depuis 2014. Elle a obtenu de nombreux prix internationaux, venant notamment de Amnesty International, pour la valeur de son combat.

 

« La crise des réfugiés syriens se terminera le jour où le régime de Bachar al-Assad tombera. »

 

 

Interview de Noura Ghazi – 15 mars 2024

Pourriez-vous vous présenter ?

Je suis Noura Ghazi, une lauréate syrienne de la première promotion de l’Initiative Marianne. Je suis activiste, militante et experte dans la défense des droits humains depuis plus de 20 ans en tant qu’avocate. Je lutte contre les détentions arbitraires et les disparitions forcées en Syrie, mais également contre la torture et la peine de mort.

Pouvez-vous décrire votre engagement en tant que Défenseure des droits ?

Depuis 2004, je dédie ma vie à la défense des droits des prisonniers politiques. En 2011, la Révolution syrienne a exacerbé les problèmes de détentions arbitraires et les disparitions forcées lors des manifestations. Mon mari, Bassel Khartabil Safadi, activiste syro-palestinien, a été emprisonné par le régime syrien en 2012 et exécuté en 2015. Nous nous sommes mariés pendant son emprisonnement, ce qui m’a valu le titre de « mariée de la Révolution ». En 2018, j’ai été forcée de quitter la Syrie pour le Liban. J’ai fondé NoPhotoZone, une ONG française fournissant un soutien aux détenus, disparus et déplacés forcés en Syrie, au Liban et en Turquie.

Pourquoi avez-vous décidé de vous engager pour les droits humains ?

J’avais 5 ans lorsque j’ai fait face à une violation de droits humains pour la première fois. Mon père avait été arrêté arbitrairement en Syrie., où il a été détenu puis a disparu. Même si je l’ai peu connu, je garde de profondes séquelles de cet évènement. C’est pourquoi j’ai décidé, dès mes 13 ans, alors que je rêvais d’être actrice, de devenir défenseure des droits de l’Homme.

Comment l’Initiative Marianne vous a-t-elle aidé à concrétiser votre projet ?

L’Initiative Marianne a été l’opportunité d’échanger avec d’autres défenseures des droits sur nos expériences. Selon moi, il est important de les défendre à une échelle internationale. Les violations des droits humains ont lieu partout et chacun peut en être victime. En ce sens, l’Initiative m’a beaucoup apporté.

La rencontre avec les autres lauréates a aussi attiré mon attention sur d’autres engagements, tels que les enjeux environnementaux. Ce sont des sujets primordiaux auxquels s’intéresser dans sa vie quotidienne.

Ces échanges intra-promotion m’ont permis d’en apprendre davantage sur les situations d’autres pays. C’est donc avant tout la rencontre de ces femmes défendant les droits humains qui m’a le plus apporté, que ce soit personnellement ou professionnellement.

Quelles sont les activités qui vous ont été les plus utiles durant le programme ?

Toutes étaient utiles pendant le programme. Je me rappelle avoir trouvé la formation sur les ONG internationales particulièrement intéressante au regard de mon parcours. Les visites m’ont aussi marquée, notamment celle de l’Assemblée nationale. J’ai apprécié rencontrer des membres du gouvernement français. Ces rencontres, visites et évènements m’ont permis de mettre en lumière la cause pour laquelle je me suis engagée mais également la situation en Syrie. La mise en réseau dont j’ai bénéficié m’a permis d’être identifiée en France comme lauréate de l’Initiative Marianne et d’être aujourd’hui reconnue dans la communauté des défenseurs des droits humains.

De plus, même si le programme de 2022 a pris fin, ce n’est pas le cas de mon histoire avec l’Initiative Marianne. Nous sommes toujours engagées auprès de cette dernière, que ce soit par les liens créés avec les autres lauréates de ma promotion, les nouveaux lauréats mais également les équipes avec qui je suis toujours en lien. Je continue à me rendre à des évènements majeurs et cela me donne l’occasion de revoir les lauréats de l’Initiative.

L’entièreté de ma vie a changé avec l’Initiative Marianne. Cette dernière m’a permis de développer de nouvelles relations et de créer de nouvelles amitiés. J’ai gardé contact avec Tatsiana et Nuray (Ndla : lauréates bélarusse et turque de la promotion 2022), avec qui nous continuons de nous soutenir.

Qu’avez-vous fait à l’issue du programme ?

A la fin du programme, j’ai choisi de rester en France, au vu des menaces qui pesaient sur moi en Syrie. J’ai demandé l’asile et été accompagnée dans mes démarchés par les équipes de l’Initiative Marianne. Je souhaite maintenant demander la citoyenneté française.

Concernant mon engagement, j’ai créé avec Tatsiana et Nuray une association, « Voix des Prisonniers », dédiée aux droits des prisonniers politiques et des disparitions forcées. Durant l’Initiative Marianne, je me suis beaucoup rapprochée de ces lauréates qui travaillaient sur les mêmes thématiques que moi. A l’issue du programme, nous avons conjointement souhaité construire un projet afin de poursuivre notre travail. Notre objectif est de sensibiliser l’opinion publique aux thématiques de torture, disparitions forcées et contrôle des dictateurs. Par nos actions, nous souhaitons toucher non seulement les ressortissants de nos Etats d’origine, mais également les Français et européens. Dorénavant, nous projetons de continuer le développement de cette association en travaillant sur notre site Internet, en acquérant de la visibilité et en cherchant de nouveaux financements.

De plus, je suis actuellement nommée pour le Prix Liberté de la région Normandie, par des jeunes d’une école française.

Souhaitez-vous ajouter quelque chose ?

Aujourd’hui, c’est l’anniversaire du début de la Révolution syrienne et de l’emprisonnement de mon mari. C’est un jour très important et difficile pour moi.

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